Les associés (Arte) - Ridley Scott : "Ça faisait des années que j’avais envie de travailler avec Nicolas Cage"

Rédigé le 14/12/2025
Julien Barcilon

“Une récréation." Voilà comment  Ridley Scott considère le tournage de cette comédie d’arnaque ultra divertissante. Une oeuvre, certes mineure dans sa filmographie majuscule, mais orchestrée avec brio. Il faut dire qu’en 2003 le cinéaste britannique, alors âgé de 66 ans et tout juste anobli par la reine Élisabeth II, venait d’aligner deux blockbusters d’action XXL, La Chute du Faucon noir et  Gladiator, avant de rempiler pour une autre production d’envergure. Un retard à l’allumage de son  Kingdom of Heaven (2005) lui a offert l’opportunité de réaliser Les Associés. Rien de tel que du léger, du fun sans prétention, sinon de se faire plaisir. Et dans le registre du kif – qui pourrait le contredire ? –, il n’y a pas mieux qu’une bonne petite comédie d’arnaque avec des aigrefins pieds nickelés aux antipodes des cadors de la saga Ocean’s Eleven

ROY, CÔTÉ PILE ET CÔTÉ FACE 

« J’ai été séduit par le scénario astucieux de cette fable morale singulière, puisque ses protagonistes sont assez peu recommandables. Et puis c’était l’occasion de diriger un acteur de la trempe de Nicolas Cage », expliquait sir Ridley. Et le réalisateur d’ajouter : « J’ai pensé à lui tout de suite. Ça faisait des années que j’avais envie que l’on travaille ensemble, mais j’attendais de trouver un rôle qui lui convienne. Il s’est aussitôt montré très réceptif, parce que le film correspond à son sens de l’humour particulièrement développé et sophistiqué. » Toutes ces qualités sont à l’écran. Roy Waller, son personnage, n’est pas franchement raccord avec l’image du filou 24 carats. Côté pile, sa petite entreprise qui consiste à plumer des pigeons retraités ne connaît pas la crise, et le gus est plutôt habile, malgré quelques ratés en fonction de son état mental du jour. Côté face, en privé, Roy est un névrosé carabiné, bourré de tics, de troubles obsessionnels compulsifs (tocs) doublé d’un maniaque de la propreté qui fume comme un pompier. En rupture de pilules, il prend rendezvous chez un psy qui l’invite bientôt à prendre contact avec sa fille de 14 ans qu’il n’a jamais vue. Lorsque la pétillante Angela débarque dans sa vie, Roy est métamorphosé. Exit le gagne-petit, il décide désormais de ferrer du gros poisson, comme lui suggère Frank, son associé. 

UN TRIO EN ÉTAT DE GRÂCE 

«  Dans les meilleures comédies, commente  Nicolas Cage,  il y a toujours un fond de tristesse. Le comportement de Roy prête d’abord à rire, mais on voit bien ce qu’il a de frustrant et de pénible. Les rites étranges, les routines hyper élaborées qu’il s’impose lui coûtent énormément et lui compliquent atrocement la vie. » Toujours dans l’émotion juste, Cage bannit la caricature, ce qui rend le personnage hyper touchant. Les problèmes de santé mentale, l’acteur connaît. Un héritage dont il s’est sauvé en jouant : « Sans le cinéma, je serais devenu fou », concède-t-il en toute sincérité. Mais c’est Ridley Scott qui s’identifie le plus à Roy : «  J’y ai mis pas mal de moi. C’est un compulsif, comme moi, il ne se sent bien que dans le sanctuaire de son appartement. Il a une piscine, mais ne fait que la regarder ! » Zéro caricature, donc, mais un humour omniprésent servi par un trio en état de grâce. Sam Rockwell  campe le filou canaille à la perfection, et Alison Lohman , révélation de 24 ans, incarne la fille ado avec l’aisance des surdouées. L’heure de la récré a sonné ! 

Les associés, dimanche 14 décembre à 21h00 sur Arte