Vous recevez plein de propositions… Pourquoi avez-vous accepté celle du réalisateur Laurent Cantet ?
Marina Foïs : Je lui aurais dit oui, même sans lire le scénario. C’est un très grand cinéaste. Pour un acteur, c’est une chance de travailler avec lui. Il trouve, en chacun, une grande vérité : il sait mettre les acteurs à poil, dans le bon sens du terme. À l’écran, on ne voit pas des professionnels du jeu, on voit toujours des gens. Cantet pose de grandes questions, n’assène pas de vérités, ne donne pas de leçons : il ouvre des horizons.
Parlez-nous de votre personnage…
Olivia est une écrivaine parisienne d’une quarantaine d’années qui vit de son art, mais elle traverse une panne d’inspiration. Cet atelier d’écriture avec des gens d’une autre génération et de milieux différents l’aidera, imagine-t-elle, à se renouveler. Elle pense que l’écriture a des vertus et que donner à des jeunes en difficulté les armes de la pensée et du langage est une belle mission.
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Comme Olivia, vous vous êtes aussi retrouvée face à des jeunes issus de quartiers populaires, puisque vous partagez l’affiche avec des comédiens amateurs…
La confrontation des deux mondes que raconte L’Atelier, c’est aussi ce qui se passait sur le plateau. Je suis née à Paris, dans un milieu bourgeois intellectuel, où tout était possible. C’est totalement l’inverse pour les jeunes dans ce film et les acteurs qui les incarnent. Je savais que ce serait une chance d’être face à des gens qui ne m’opposeraient pas du savoir-faire, mais leur vitalité. J’en ai rien à faire de l’expérience. Elle piège les comédiens.
Vous dites vous être sentie en éveil face à eux. Expliquez-nous…
Ils avaient l’énergie de la jeunesse et l’enthousiasme de la découverte. S’installer dans ce métier, c’est ce qui nous guette tous, avec la notoriété et les gros cachets. Moi, ça me terrorise. Si j’y succombe, je pense que je vais me mettre à très mal jouer.
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Parmi eux, il y a Matthieu Lucci : on peine à croire qu’il débute…
Ils étaient tous bons. Lui, il avait quelque chose de plus complexe à jouer. J’ai été tout de suite fascinée par sa facilité. Il était toujours au bon endroit et n’a jamais cherché à sauver son personnage, en assumant sa face noire. C’est d’une intelligence prodigieuse pour un novice. Matthieu est un grand acteur. Il a beaucoup de plaisir à jouer. Depardieu m’a dit : « Si tu joues une scène où tu pleures et que tu ne ris pas à l’intérieur, ça n’a pas d’intérêt. » Matthieu a ce truc-là.
Quel est le message du film ?
Il y a en beaucoup, mais ce qu’il me reste de très fort, c’est cette idée qu’un monde qui méprise sa jeunesse est un monde déjà mort. Ce n’est pas parce qu’ils n’ont pas lu Montaigne, à 20 ans, qu’ils n’ont pas d’idées sur le monde, ce n’est pas parce qu’ils regardent des écrans que ce sont des incapables.
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Quel souvenir gardez-vous de la montée des marches à Cannes avec l’équipe, en 2017 ?
C’était très marrant, moins protocolaire. Les jeunes étaient surexcités, une des filles a pris une photo avec Nicole Kidman. C’était hyperchouette, mais ce n’était rien par rapport à l’intensité du tournage. Cannes, c’était la cerise sur le gâteau.
L'atelier, vendredi 7 novembre à 21h00 sur France 4
Propos recueillis en 2018

